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Allard-poesi Florence, Koenig Gérard, Laroche Hervé, Vidaillet Bénédicte

Organisation et Animation

Gérard KOENIG, Professeur, IRG, Université de Paris XII

Participants

Florence ALLARD-POESI, maître de conférence, Université de Paris XII

Hervé LAROCHE, Professeur, ESCP

Bénédicte VIDAILLET, maître de conférences, l’Université de Lille 2

Objectifs

A la fin des années soixante, la théorie des organisations avait entrepris d’intégrer les apports de l’analyse systémique. Cet aggiornamento conduisit à considérer l’organisation comme un système ouvert sur l’extérieur et par conséquent à abandonner la recherche de solutions universelles. Le courant de la " Contingency Approach " est typique de cette orientation intellectuelle. C’en était fini du " One Best Way " classique : L’efficacité des formes organisationnelles ne pourra plus désormais être appréciée hors contexte. L’évolution est réelle, mais les parentés entretenues empêchent de parler de rupture paradigmatique. D’un point de vue épistémologique, l’approche classique et " l’approche contingente " d’inspiration structuro-fonctionnaliste partagent la même ambition nomothétique. D’un côté comme de l’autre, l’inspiration est clairement déterministe. Sur le plan théorique, les aspects structurels continuent d’être privilégiés et l’organisation d’être vue comme un instrument au service de la politique générale. D’un point de vue praxéologique enfin, les deux approches souscrivent à une conception purement téléologique de l’action : Celle-ci est pensée et ordonnancée de manière à atteindre des objectifs prédéterminés. Il n’est sans doute par exagéré de dire qu’avec la publication en 1969 de " The Social Psychology of Organizing ", Karl Weick donne le coup d’envoi d’une vaste entreprise de subversion du paradigme dominant. L’attaque n’est pas frontale. La controverse n’est pas engagée explicitement avec les représentants du paradigme dominant : Ni leurs thèses, ni leurs noms ne sont cités. Weick feint de se situer ailleurs, dans le champ de la psycho-sociologie ; de s’intéresser à d’autres aspects (le processus) et à d’autres questions (l’élaboration du sens). L’attaque pourtant est radicale : Elle vise rien moins qu’à constituer un paradigme alternatif. Même s’il mobilise, à l’occasion, méthodes quantitatives et expérimentales, Karl Weick ne cherche pas à établir des lois de portée générale à la fois simples et précises, ni à transposer aux sciences sociales les manières des sciences de la nature. Ce serait d’ailleurs peu compatible avec son orientation interactionniste. Si elle reconnaît l’existence de règles propres, l’approche interactionniste pose en effet que les résultats d'une interaction sont imprévisibles et rejette toute forme de déterminisme. Au plan théorique, le décrochement d’avec le paradigme dominant est bien sûr considérable. Tout y contribue, qu’il s’agisse des questions posées ou des concepts mobilisés, mais un point mérite tout particulièrement d’être souligné. Dans l’approche weickienne, les organisations cessent d’être considérées comme des moyens au service de fins qui leur seraient assignées ; elles sont des fins pour elles-mêmes. Du point de vue praxéologique, enfin le renversement opéré par Karl Weick est tout aussi significatif. La condition humaine ne se confond pas avec la visée projective ; l’individu est jeté au monde, pris dans le flux et le sens s’élabore, fondamentalement, de façon rétrospective. L’ambition de la table ronde n’est pas de dresser le sismogramme complet d’une telle secousse, mais plus modestement d’en mesurer, avec Bénédicte Vidaillet, les effets au foyer particulier de la décision, d’apprécier, avec Hervé Laroche, les risques de voir se propager cet ébranlement jusqu’aux terrains de l’évaluation et du jugement et enfin de s’interroger, avec Florence Allard-Poesi, sur la nécessité face à un bouleversement de cette ampleur de réinventer nos sismographes.
Bénédicte Vidaillet : " Montrer en quoi l'approche par la construction du sens renouvelle la perspective sur la décision dans les organisations". La question de la décision dans les organisations et de la manière dont elle se forme est centrale dans la plupart des travaux en théorie des organisations. Karl Weick l'aborde également. Cependant, sa pensée marque une certaine hésitation : il paraît à certains moments la remplacer par une conception centrée sur les processus de sensemaking, à d'autres envisager la co-existence de différents types de processus, plus ou moins rationnels ou interprétatifs. Nous essaierons de préciser ce qui peut être tiré des travaux de K. Weick en ce qui concerne la formation des décisions dans les organisations. Hervé Laroche : "De la construction du sens à la fabrication des jugements sociaux". Dans les organisations, on tente de faire sens de l'environnement et de ce qui se passe, mais on s'occupe également beaucoup d'évaluer et de juger (les gens et les actions, notamment). La notion de sensemaking développée par K.E. Weick, pour riche qu'elle soit, semble dépourvue de toute dimension évaluative. Comment pourrait-on rendre compte de cette dimension centrale dans toute démarche de management ? Comment pourrait-on l'articuler avec le processus de sensemaking ? Florence Allard-Poesi : " Renouveler nos outils méthodologiques pour appréhender le caractère fluide, changeant, dynamique de l’élaboration. du sens " Dans la lignée d'un questionnement méthodologique mené sur des recherches empiriques ayant pour objet la construction du sens, il est proposé une réflexion sur le paradoxe qu'elles portent et la nécessité de renouveler nos outils méthodologiques pour appréhender le caractère fluide, changeant, dynamique, etc. de cette élaboration. Autrement dit, une réflexion sur notre manière de construire du sens sur la construction du sens.